Nuages

Un syndicat, c'est quoi ? Et à quoi cela sert-il ? Comment bien le choisir ?
 
Je ne vous donnerais pas ici les définitions livresques ou légales du syndicat mais plus la réalité pratique de l'existence même de celui-ci, ses intérêts (pour vous et pour lui), ses avantages et ses défauts.
 
Un syndicat c'est quoi ?
C'est un ensemble de personnes qui décide de se retrouver ensemble pour informer, défendre une cause ou une idée. Mais un syndicat a aussi, contrairement à une association, vocation à représenter les professionnels et éventuellement les défendre au sein des institutions. Ce dernier point est hautement important, mais nous y reviendrons.
 
Professionnels ou amateurs ?
C'est une question éthiquement très complexe et la réponse n'est pas des plus simples.
Je n'ai pas d'avis tranché. Pour avoir navigué au sein de syndicats amateurs et parmis les syndicalistes professionnels, finalement l'idéal serait peut être un mélange des deux.
 
Vous ne vous en rendez pas compte, mais les réunions concernant la profession sont hebdomadaires. Les institutions sont nombreuses et leur articulation entres elles est parfois dénuée de simplicité. Ne négligez pas non plus les réunions et rencontres inter-professionnelles. Si l'on souhaite faire avancer sa profession il faut avoir un regard le plus large possible et savoir étudier et analyser ce qui se passe dans les autres professions médicales et paramédicales et même ailleurs.
 
Il faut donc au sein du syndicat quelques personnes ayant une disponibilité et une présence assurée importante.
De fait, la disponibilité du syndicaliste professionnel a là un avantage, mais ne négligez pas la disponibilité du bénévole engagé !
 
L'inconvénient direct du professionnalisme... l'argent et le pouvoir.
 
N'en doutez pas une seule seconde, la motivation de certains n'est en aucun cas la profession. N'exerçant plus dans leur cabinet, ces pseudos kinés n'ont plus qu'un seul intérêt, assurer la pérennité de leur entreprise qu'est devenu le syndicat.
Demandez le bilan comptable des syndicats. Certains sont sous forme associative, recettes-dépenses, rien de plus simple et transparent. D'autres... à partir du moment où l'on parle d'actif et de passif, sont dans une réalité tristement commerciale.
Énorme avantage de ce côté aux amateurs...
 
Un syndicat devrait être indépendant financièrement et non lié à des activités commerciales directes ou indirectes. Lorsque ce sont les formations ou la vente d'objets divers et variés qui "renflouent" la section syndicale déficitaire car les indemnités payées aux dirigeants sont trop importantes, là aussi, ne doutez pas de l'intention de ces dirigeants… et ce n'est pas "défendre la profession" !
Cependant, l'aspect financier est important dans un syndicat, et ne le négligez pas. Mener des actions en justice pour défendre les intérêts des uns ou des autres ou même ceux de la profession, cela a un coût.
 
Le syndicat n'est pas un mécène et trop nombreux sont les gens qui se présentent en demandant de l'aide en arguant qu'ils adhèreront en cas de réponse positive.
 
Il me semble évident qu'il faut se syndiquer pour avoir la meilleure représentation possible. Plus un syndicat a de fonds dédiés à la défense des professionnels, et plus il est efficient.
 
Il est par ailleurs martelé dans les communications syndicales et sur les réseaux sociaux que notre profession est "faiblement syndicalisée".
En fait, il n'en est rien. En effet, la dernière enquête de représentativité montre qu'environ 10% de la population libérale est syndiquée. Or, cette proportion est équivalente à la moyenne nationale toutes professions confondues.
Notre profession est donc globalement dans la moyenne. J'irais même plus loin en pensant que l'on pourrait imaginer que des libéraux soient plus faiblement syndiqués que des travailleurs salariés.
Cependant, oui, par rapport à quelques professions médicales et paramédicales, notre taux de syndicalisation est un peu bas.
 
 

Le commerce

Oui n’ayons pas peur des mots, nos syndicats sont de véritables entreprises au bilan comptable strictement et uniquement à but commercial.

Ayez juste conscience que vous n’adhérez pas toujours à un syndicat, mais bien souvent à une machine commerciale qui vous vendra bien des produits sous couvert de « c’est pour votre bien, ayez confiance… ».

Mais force est de constater que quand un syndicat vous « tient » pas la seule assurance responsabilité civile, il est à se demander si cet organisme veut réellement votre bien ou si il ne souhaite qu’une seule chose c’est que vous continuiez à adhérer par la force des choses.

Il en est de même pour toutes les prestations que nos syndicats offrent, association de gestion, librairie, organisme de formation etc…

La plupart de nos syndicats n’ont de syndicat que le terme, mais sont en réalité de belles entreprises commerciale qui n’ont qu’un seul objectif, vous vendre !

 

J’ajouterais que depuis le décret du 9/05/17 modifiant les modalité des élections aux URPS, le nombre de sièges possible étant définis par le nombre d’adhérents, les syndicats ont donc tout intérêt à avoir le plus grand nombre d’adhérents.

N’en doutons pas, l’intelligence machiavélique de certains dirigeants saura vous séduire, voir vous charmer pour vous faire adhérer ou même vous offrir une adhésion pour mieux vous cadenasser par la suite…

 

C’est pourquoi…

 

Ayez un regard critique et suivez deux principes simples

Il y a un point commun entre le monde politique, le monde syndical et le grand banditisme (oui j’ai osé !).

Il faut suivre deux principes pour comprendre comment tout s’organise…

Suivez l’argent

D’où vient il, comment est il utilisé et où va-t-il ?

À qui profite l’action

Pourquoi faire cela et dans quel but. Qui sera le réel bénéficiaire de cette action.

Un exemple simple, votre adhésion…

D’où vient l’argent ? De votre poche.

Comment est-il utilisé ? Là la réponse n’est pas aussi simple qu’il y parait. On pourrait répondre, il va au syndicat. Et bien non. Décortiquez votre cotisation et voyez comment elle s’articule. Il y a une part syndicale, une autre part qui peut être fédérale, nationale ou sous tout autre appellation et en fin il y a souvent une part assurantielle. Vous pourrez alors vous rendre compte que la part strictement syndicale est minime. Ne soyez pas dupe…

Se pose alors la seconde question, à qui profite l’action ?

Et bien finalement votre action ne profite pas obligatoirement au syndicat et donc à la défense des professionnels, non l’action profite souvent plus à une compagnie d’assurance !

De la même façon, quand un syndicat publie un article, posez vous les deux mêmes questions… Qui a financé, pourquoi, comment, à qui cela va-t-il profiter ?

 

La démocratie participative

Qu’est-ce donc ?

La démocratie participative est une forme de gouvernance, où les « élite » consultent la « base » pour la faire participer à l’action.

Excellente idée que voilà. Oui… Mais… La démocratie participative a deux échecs majeurs. Souvent elle est le signe que les « élites » n’ont rien à apporter, ce qui est un trais mauvais signe sur le long terme. En effet, surtout venant d’un syndicat, les idées doivent être fortes, pérennes et surtout la ligne syndicale doit être inscrite sur le long terme.

Le second échec est que la « base » ne maîtrise pas l’ensemble des arcanes qui entoure son fonctionnement. Il en ressort que les doléances émanant de la « base » sont souvent en gros décalage avec la réalité. Par exemple, moi aussi j’aimerais bien gagner 30€ par séance, mais cela impliquerait une dépense supplémentaire de 3 ou 4 milliards à l’échelle nationale. Or, le budget pour augmentation qui nous est alloué doit être de 100 ou 200 millions. Il est donc totalement inutile de discuter pendant des heures si l’on a pas ces données, la mesure est simplement inenvisageable, sauf à trouver de l’argent ailleurs (comme ici ou )…

 

Dernier point hautement important, il ne faut pas confondre démocratie participative et populisme. En effet, si un syndicat décide d’interroger ses adhérents sur tel ou tel sujet, nous sommes dans la démocratie participative, excellente chose tant que cela reste en complément des idées avancées par le syndicat.

Si par contre un syndicat veut aller glaner des idées chez les autres en effectuant une campagne « nationale », c’est certes très intelligent politiquement parlant, mais la preuve d’une paupérisation intellectuelle au sein même du syndicat. Reposez-vous alors les deux questions… 

D’où vient l’argent ? Et bien le syndicat a financé une grand campagne. Si cela est fait par voie électronique sans grand support ou un support type « doodle » ou « google form », cela n’a rien couté, pas d’argent en jeu. Si à l’inverse on installe un système coûteux, ce sont bel et bien les adhérents du syndicat qui ont financé. Cela implique directement que pour un non syndiqué, il se dit « quel est l’intérêt de me syndiquer puisque même si je ne le suis pas on me demande mon avis ? ». Réciproque mathématique, le syndiqué peut se dire « j’ai cotisé pour que l’on prenne en compte mon avis et finalement on le demande à tout le monde, et en plus c’est ma cotisation qui a financé ! ». 

À qui cela profite-t-il ? Et bien pas à vous, car le syndicat va utiliser votre avis pour définir sa ligne de conduite mais comme vous n’êtes pas membre du syndicat, cela ne vous sert à rien. Non le grand gagnant de l’histoire est bel et bien le syndicat qui va aller piocher des idées de ci de là, les dirigeants qui en manque d’idées, n’ont pas grand chose à faire pour en trouver. Et si finalement le « packaging » est joli et qu’à coup d’argumentaire commerciaux on arrive à faire croire que tout cela est au profit de la profession, un comble !

 

Tout ceci étant dit, je pense qu’il faut un minimum de démocratie participative au sein d’un syndicat. Cela peut permettre de mettre en avant des gens de la « base » qui pourront démontrer qu’ils ont des idées et avec un minimum de soutien, il pourront évoluer et devenir des réels acteurs au sein de la structure syndicale.

 

Le système pyramidal

À l’inverse de la démocratie participative on trouve le système pyramidal. Une « base », des « cadres dirigeants » et les « élites » voir « un big boss » ou un tout petit groupe de 3-4 personnes qui est à la tête d’une véritable holding. Souvenez-vous, le roi et sa cour, les nobles, le peuple… (il ne manque que le clergé… Peut être pourrions nous dire que le CNOMK a ce statut…).

Ce système est intéressant lorsqu’en haut de la pyramide se trouve une « élite » réellement pensante, investie, maîtrisant le « système », ses leviers etc… Mais il faut que cette élite soit à l’écoute et puisse faire évoluer le gens au travers de la pyramide.

Le principal risque est d’avoir comme nous l’avons malheureusement en politique ou au travers de notre univers syndical, des gens qui se croient « élite » et qui finalement ne sont que médiocres.

 

Le système idéal ? Une structure semi-pyramidale avec une ouverture à la vraie démocratie participative. Une « élite » forte avec des idées fortes et surtout une ligne de conduite qui est stable et marquée dans le temps.

 

Doit on partager toutes les idées d’un syndicat ?

Ma réponse est claire, non.

Il est impossible d’être d’accord sur tous les détails organisant notre vie professionnelle. Nous le voyons tous les jours en politique, les uns passent d’un bord à un autres. Ce qu’il faut c’est partager la ligne de conduite syndicale et l’idée globale. C’est bien pour cela qu’il faut un syndicat ayant des idées fortes et pérennes.

La question revient souvent sur les réseaux sociaux, « quel syndicat choisir ? », cela montre bien que malheureusement la plupart de nos syndicat n’ont aucune identité.

Il est donc d’emblée difficile de se projeter dans l’avenir avec un syndicat qui n’a pas d’identité et souvent l’adhésion ne se fait que parce qu’untel ou unetelle, un ami, une amie, ou une connaissance est déjà au sein du syndicat.

Pire suivant l’organisation du syndicat il peut y avoir des idées au niveau local qui ne sont pas reprises au niveau national, voir ces même idées sont fermement combattues !

Comment Choisir ?
Un syndicat doit être choisi en fonction des idées proposées, de son mode de fonctionnement, de son mode de financement, des "options imposées" comme les assurances qui doivent rester "facultatives" et non "obligatoires". Lisez bien les termes des adhésions. Car certains sont les champions du monde pour proposer quelque chose "d'optionnel" qui devient "obligatoire" l'année suivante…
Vérifiez l'activité du syndicat et n'oubliez pas qu'un syndicat qui publie sur les réseaux sociaux sa présence à des évènements tous les deux jours, devra dépenser énormément  en indemnités pour rétribuer les personnes concernées, sauf si celles-ci sont bénévoles.
Gardez aussi à l'esprit qu'un syndicaliste "amateur" a pour lui d'être dans son cabinet tous les jours, de réellement agir et interagir au sein des conditions d'exercice et donc plus à même de comprendre le quotidien que nous vivons.
Faites aussi attention à où va l'argent, comment et dans quel but.
 
Ne vous laissez pas charmer par les outils de communication qui coûtent chers et qui de fait diminuent la part financière dédiée à la défense des professionnels.
 
Étudiez les idées proposées et surtout regardez comment elles peuvent être mises en œuvre et si il y a une cohérence entre l'action syndicale et les idées avancées.
Un syndicat qui propose 30€ la séance et qui va signer une convention à 16.13€ la séance n'est pas cohérent; Un syndicat qui avance 30€ la séance et qui a le courage d'aller le proposer à l'ensemble des pouvoirs publics, lui est cohérent.
 
Cherchez aussi à voir comment le syndicat est organisé, de sa base à sa tête. Pour vous aider vous retrouverez l'organisation des trois syndicats majeurs dans cet article.
 
Regardez comment les décisions sont prises et comment elles sont intégrées par la base.
Aujourd'hui la représentation "locale" n'a plus d'importance. Les moyens de communication sont multiples et efficients et avoir un "syndicaliste" à côté de chez soi n'apporte rien.
 
Vérifiez aussi que les représentants syndicaux ne soient pas des "cumulards" avides d'indemnités syndicales, ordinales, urps et autres.
 
Enfin, n'oubliez pas qu'il y a dans tous les syndicats des gens honnêtes et valables, tout comme des gens stupides et égocentrés. Là encore, regardez l'ensemble du syndicat.
 
Pour le salarié, le choix est assez restreint, certains syndicats ne parlant même pas de l'exercice salarié et pourtant c'est aussi notre profession !
Et c'est même souvent par l'exercice salarié que nos compétences ont été élargies, alors oui, il faut prendre une grande attention à ce que le syndicat défende l'ensemble de la profession.
Et même si les kinésithérapeutes salariés s'orientent plus vers les grandes centrales syndicales (cgt, cfdt, sud, fo...) regardez si le syndicat que vous avez choisi a déjà signé un communiqué commun avec ces grandes centrales...
 

Le syndicat défend il "la profession" ?

Notre profession souffre malheureusement de la mégalomanie de certains dirigeants qui pensent ou ne parlent que de "la profession" alors qu'ils devraient se souvenir que ce que défendent les syndicats ce sont bien les intérêts des professionnels !

Avez vous déjà entendu un dirigeant de la CGT, FO, CGC, Sud ou autre centrale syndicale parler de "la profession" ? Non, jamais. Le seul intérêt des centrales syndicales est "la plénitude des travailleurs".

Voilà le grand échec de nos syndicats. C'est l'histoire de la grenouille voulant se faire aussi grosse qu'un boeuf…

Et c'est ainsi que nous en sommes arrivés aux errements actuels où des syndicats se sentent investis de défendre l'ensemble de la profession, parlent en son au nom et finalement méprisent leurs adhérents.

L'état a même participé à cette mascarade en créant les Unions Régionales des Professionnels de Santé (URPS) et en faisant croire que les syndicats pouvaient par le biais des URPS contrôler les politiques de santé. Or, il n'en est rien Car quand on regarde comment s'insèrent les URPS dans le système se santé, on s'aperçoit que celles-ci sont à la solde de l'état, et ne font que ce que l'administration n'avait ni le temps ni l'envie de faire.

Et pour l'instant toutes les manoeuvres politico-politiciennes des syndicats présidant les URPS ont échoué car l'état organise le système de santé depuis le ministère et délègue au fur et à mesure des échelons inférieurs…

Le fait est qu'il n'en faut pas plus pour comprendre que les adhérents fuient les systèmes syndicaux qui ne présentent aucun intéressement pour leurs adhérents.

Alors oui, les syndicats doivent s'occuper des évolutions et modifications de "la profession", mais non pas en tant que tel, mais au titre de l'influence sue cela pourrait avoir pour les professionnels.

Et si il existe une confusion majeure entre syndicats, ordre et autres, c'est bien parce que nos syndicat sont omnipotents, totipotents et et avides de concentration horizontale…

Le jour où nos syndicats reprendront la place qui est la leur, le jour où ils arrêteront le démarchage commercial, le jour où ils auront simplement de réelles idées pour les masseurs-kinésithérapeutes…

Ce jour là… les adhésions suivront.

En attendant… l'érosion n'est qu'une conséquence des politiques syndicales désastreuses et délétères.

 
Comme vous le voyez, il y a matière à discussion sur le sujet et je pourrais vous en parler pendant des heures.
Faites votre choix en âme et conscience, attentions aux promesses et aux outils de communication...

 

 
Vincent Jallu